Le Père ALBANI Joseph (Charles)
(1902 - 1978)
Né le 24.07.1902 à Crespi (It)
Profès le 17.10.1920 à Albisola (It)
Prêtre le 29.05.1926 à Bologne(It)
Décès le 13.02.1978 à Milano (It)
Miss au Cameroun (1927 à 1969)

42 ans de Cameroun ! C'est quelque chose !
Des lieux, des dates, des nominations ici ou là ne peuvent nous faire pénétrer dans une vocation missionnaire. Que dire du P. ALBANI ?
C'est à Bergame en Italie qu'est né le P. Giuseppe ALBANI en 1902. Tout près de chez lui, à Albino en 1907, vient de s'établir une Ecole Apostolique, "l'Ecole des Prêtres français" dit-on encore dans le pays ; le jeune Giuseppe s'y fait inscrire. Le Noviciat à Albisola est fondé en août 1919 ; il est le premier à y entrer, pour faire profession en octobre suivant. Il fera partie des 4 premiers prêtres de la nouvelle Province italienne. Ordonné en 1926, il sera encore le premier missionnaire que cette jeune Province enverra moissonner au Cameroun en 1927.
"Moissonner", c'est beaucoup dire ! Car il faut d'abord "planter", même avant, il faut "défricher -débrousser".
Tout est à faire en 1927, quand le Père Joseph débarque. Pendant 7 ans il sera 2ème vicaire à Mbanga à côté du P. Lebrun. Il sera à bonne école ! formé à son rôle de missionnaire par 2 apôtres exceptionnels : Mgr Plissonneau qui baroude depuis 1920 et le père Bouque, arrivé l’année précédente et qui sera bientôt Mgr Bouque, l’Evêque de Nkongsamba.
C'est l'époque où il faut être planteur dans l'immense plantation de la Mission de Mbanga; instituteur ou directeur d'école selon les nécessités; maçon pour les premières constructions; bûcheron et menuisier pour tirer portes, fenêtres et meubles, d'acajous de 2 mètres de diamètre et plus; soigner les malades ; écouter les palabres ; enseigner la doctrine baptiser, confesser... et faire le palefrenier, car on se déplace uniquement à pied ou à cheval pour visiter les brousses. I1 y avait parfois compétition entre Cocotte... (c'est-à-dire le cheval du P. Bouque) et celui du père Albani : à qui arriverait le premier à Souza ? (... et presque toujours c’était Cocotte qui l'emportait.)
En 1935 le P. Joseph est nommé Supérieur à Bonabéri. I1 pourra donner sa pleine mesure : le territoire est immense, l'évangélisation déjà très avancée, et l'on doit construire une église en dur, la proximité du port permettant de se fournir facilement en ciment. Les travaux dureront de 35 à 38. Qui, venant pour la première fois à Bonabéri, n'a remarqué sur les claustras de l'église, la foi du P. Joseph s'exprimer en moulages sculptés, simples, mais expressifs : le Coeur blessé du Christ, la couronne d'épine, les instruments de la Passion, la croix de Profession, l'Eucharistie. n’est-ce pas là un résumé de sa prédication : l'Amour du Christ et la Réparation en répondant à cet Amour Sauveur ?
Bonabéri, c'est le grouillement d'un port, et le P. Joseph assure par intermittence les fonctions de Procureur. I1 sera présent, 27 ans durant, à l’arrivée des missionnaires. I1 est là sur le quai quand accoste le bateau venant de Marseille ou de Gênes. "Qui sont les Prêtres du Sacré-Coeur à bord demande-t-il. Parmi les soutanes blanches accoudées à la rambarde des mains s’agitent. Souvent il pleut à torrent mais qu'importe, en bas de la passerelle il accueille à bras ouverts les nouveaux venus et on fête l'arrivée au Café Eymann. On est tellement heureux qu'on oublie l'heure de la chaloupirogue pour traverser le Wouri et l'aventure commence sur une peu rassurante pirogue... A la Mission c'est l'accueil dans l'église où tous les écoliers sont là; on donne le Salut du St Sacrement, on chante un Magnificat émouvant à plusieurs voix, on adresse son premier message missionnaire "à toute Afrique' à travers ces jeunes chrétiens rassemblés.
Combien de fois sera renouvelé, sans jamais s'affadir, cet accueil du père Joseph ? I1 est vrai qu'il avait un tempérament pour cela ! I1 y a aussi toutes les marchandises qui débarquent, car tout doit venir de France, et le Père a fait des douaniers ses amis, grâce à sa bienveillance et à sa bonne humeur. Ça facilite les choses !
Le 30 août 59 a profondément marqué le P. Joseph. I1 vient d'accueillir le P. Gilles Héberlé de retour de France. Au repas du soir, tout d'un coup la porte s'ouvre ; d'un coup de machette le P. Musslin juste en face de la porte est tué. C'est la manifestation de la Rébellion au Cameroun, et on a cherché à tuer, le jour même de son retour, le P. Gilles, trop ardent défenseur des petits et des humbles, pour disperser les brebis en frappant le Pasteur. I1 sera abattu 3 mois plus tard à Bafang.
Les années passent. Le Père est nommé en 62 à Nyombé, autre grande mission en plein essor. Mais l'âge vient, et en 69, trop fatigué, le P. Joseph après son congé reste en Italie.
Le Père fut le conseiller très écouté par Mgr Bouque, et son avis eut aucoup d'importance. C'est une relation de dépendance du missionnaire à l’égard de son évêque, mais en même temps une amitié qui ne se démentira pas, jusqu'à Mougins où le Père vient faire de longs séjours en hiver, spécialement à l’époque où Monseigneur est immobilisé à l’hôpital.
Un confrère qui a vécu avec lui disait : «Le P. Joseph se plaisait vraiment en compagnie des confrères. Sa bonne humeur, sa personnalité créaient une ambiance sympathique, mais aussi religieuse et profonde, n'omettant jamais la concélébration ou la prière-commune. Dans les discussions religieuses, il se montrait documenté en théologie, n'admettant pas facilement des positions "modernes". I1 n'était pas l'homme à dire oui au premier venu, et s'il usait de diplomatie pour amener à ses idées, beaucoup savaient reconnaître après coup la justesse de son analyse».
Une grave maladie devait l'atteindre en octobre dernier : entièrement paralysé, son tempérament bouillant était mis à rude épreuve. I1 sut la supporter généreusement et faire répondre aimablement un petit mot à ceux qui lui avaient écrit. I1 est parti le 13 février chercher sa récompense après une semaine de très dures souffrances, mais ayant gardé sa lucidité et sa générosité d'offrande jusqu'au bout.
I1 est enterré à Albino, là où avait commencé sa vocation d'enfant.

AVANT-PROPOS, EXERGUE - CAUSES INTRODUITES