Le jeudi
20 mai, fête de l'Ascension, le Père Joseph
PARIS était encore bien conscient. Il l'est d'ailleurs pratiquement
resté jusqu'à la fin. Les confrères qui l'ont
visité et le personnel soignant ont essayé de lui
faire vivre au mieux, spirituellement, cette fête. Le lendemain
21 mai, à 4 heures du matin, c'est dans la lumière
de cette fête de l'Ascension qu'il a fermé les yeux
à la lumière de ce monde pour les ouvrir à
la lumière éternelle de Dieu. Et ce, dans la 84ème
année de son âge, la 65éme de sa Profession
Religieuse et la 57éme de son Sacerdoce.
En tête de liste de notre "Elenchus" (annuaire religieux),
il était le religieux le plus ancien de notre Province Française
et le seul à avoir encore connu notre fondateur, le Père
DEHON.
Le Père Joseph PARIS est né le 3 février 1910
à LANDRECIES (Nord).
En octobre 1920, âgé de 10 ans, il entre à 1'Ecole
Apostolique Saint-Clément de THIEU en Belgique. (C'est à
ce moment-là, entre 1920 et 1925, à 1'occasion d'une
Fête, qu'il fait la connaissance du Père DEHON).
En juin 1927, âgé de 17 ans, il entre au Noviciat de
BRUGELETTE. Il y fait Profession Religieuse l'année suivante,
le 29 septembre 1928.
Durant une année il est professeur à l'Ecole Apostolique
de BLAUGIES. De 1929 à 1931, il fait ses études de
philosophie à LOUVAIN. De 1931 à 1932, il fait son
service militaire à ALGER. De 1932 à 1933, il est
professeur à l'Ecole Apostolique Saint-Clément de
VIRY-CHATILLON. De 1933 à 1937, il fait ses études
de théologie à LILLE.
Le 5 juillet 1936,il y est ordonné prêtre ainsi que
sept autres confrères dont l'un est encore bien vivant (92
ans) à MOUGINS: le Père Charles SPITZ
Après avoir terminé sa 4ème année de
théologie, le Père Joseph va poursuivre ce qu'il a
commencé. Il va se consacrer au professorat dans nos Ecoles
Apostoliques en France puis en Afrique. Il sera professeur durant
deux ans à Saint-Clément (1937-1939). Mobilisé
pendant la guerre 1939/40, il sera ensuite professeur à Neussargues
durant sept ans (de 1940 à 1947), puis il le sera au Cameroun
durant vingt sept ans (de 1948 à 1975).
En 1975, il rentre définitivement en France et est nommé
à la communauté de Viry-St-Clément. Il y reste
jusqu'au 19 août 1982, date où il rejoint la communauté
de Mougins. En retraite de professorat, il ne s'ennuiera jamais.
Il sera toujours un homme heureux. 11 suffira qu'il ait entre les
mains un livre (aux pages les plus jaunies possible) et à
la bouche une pipe. En même temps, il témoignera d'une
très grande disponibilité pour assurer l'un ou l'autre
ministère sacerdotal à l'extérieur: messes,
prédications, confessions, etc... Il consacrera aussi une
grande partie de son temps à effectuer des traductions de
textes (surtout écrits du Père Dehon) au service de
la Maison Généralice.
Depuis plusieurs mois, il s'affaiblissait de plus en plus, miné
par la maladie. Quant à lui, il ne s'inquiétait nullement.
Lorsqu'il a été averti de la gravité de son
état, loin de s'affoler, il a accepté la réalité
avec beaucoup de foi. Il en a tiré cette conclusion, résumée
dans cette phrase: "Je n'ai plus qu'à me préparer".
Et il m'a posé cette question: "Qu'est-ce que je dois
faire ?".
Dans sa situation qui devenait de moins en moins confortable (sans
trop de souffrances physiques cependant), il est resté très
naturel et abandonné, comme un enfant. Extérieurement,
il n'a rien changé dans son attitude. Il a gardé sa
sérénité, son sourire et même son humour.
Pour preuve, voici quelques faits tout simples:
-Durant plusieurs jours les épreuves de santé se succèdent.
En plus de sa maladie, il souffre d'un fort mal de dent, puis, tombant
de son lit, il se fracture plusieurs côtes. Il m'explique
cela en riant: je lui dis: "Et ça vous fait rire ?".
Il me répond en riant: "Que voulez-vous que je fasse
d'autre?".
-Une fois alité d'une façon permanente et comme prisonnier
dans son lit, il s'offrait le luxe, si j'ose dire, de grignoter
en bonne quantité des petits biscuits «BRUN»
"Ça remplace la pipe", disait-il. Lors d'une visite,
je le vois en train de sortir ces biscuits d'un paquet pour les
déposer sur une assiette. Je luis dis: "Vous êtes
bien occupé avec vos petits gâteaux !". Il me
répond en riant: "Que voulez-vous, il faut bien que
je travaille un peu".
-Lors d'une visite en fin de journée, il me dit: "J'ai
bien dormi cet après-midi". Et il ajoute: "C'est
important de pouvoir bien dormir le jour quand on ne peut pas faire
autre chose. Je lui réponds: "Vous avez raison. Mais
je constate que, quand vous ne dormez pas, vous faites quelque chose
de très important: vous priez avec le gros chapelet que vous
avez autour du cou. Il me dit, toujours en riant: "11 faut
bien que je prie pour avoir la force d'accepter les prédictions
qui m'ont été faites".
Le Père Joseph laisse le témoignage d'un religieux
fervent, très attaché aux valeurs de la vie religieuse,
à l'esprit, à la spiritualité de la Congrégation
ainsi qu'à leurs expressions dans les formules et les prières.
Dans ses homélies ou causeries, il avait toujours à
coeur de citer des paroles du Père Dehon et des passages
de nos Constitutions. Bien sûr, il était un tantinet
rigoriste et à cheval sur les principes; ce qui ne l'empêchait
pas d'être un homme de grand coeur, bon, délicat, toujours
souriant avec ses rires et ses sourires bien à lui. Dans
les conversations, en cas de conflits d'opinions, il avait l'art
"d'arrondir les angles", comme on dit.
Intellectuel, cultivé, il l'était. Mais, en même
temps, il avait les pieds bien sur terre, toujours attentif aux
personnes et aux événements, y compris durant sa maladie.
Ses visiteurs n'avaient guère le temps de lui poser la question:
"comment ça va". Il était toujours le premier
à la poser. Et il ajoutait ordinairement cette question:
"Quoi de neuf ?". Un malade qui ne se repliait pas sur
lui-même... Loin de là ! Et tous ceux qui sont allés
le visiter peuvent témoigner qu'ils ne sont jamais sortis
de chez lui sans avoir entendu cette phrase qui sortait vraiment
du fond de son coeur: "Merci de votre visite !".
Père Joseph, à nous aujourd'hui qui vous avons connu,
avons vécu avec vous de vous dire "merci". Merci
pour votre présence, vos bonnes paroles, votre sourire, votre
bonté qui ont été pour nous autant de visites
de Dieu. Et avec vous nous disons "merci" au Seigneur
pour tout ce qu'il a réalisé de bien et de beau en
vous et par vous ici en France et au Cameroun.
Père Marcel DELODDERE scj
AVANT-PROPOS,
EXERGUE - CAUSES
INTRODUITES
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