Extrait dun
article du P. Fr. Héberlé paru dans le «Petit-clerc
du S-C»
Octobre 1936 :
«D'autres jeunes talents, pleins de promesses, s'exercèrent
aussi à l'ornementation de la scène dans la belle
salle de spectacles qui fut aménagée vers 1892. Les
tableaux et panneaux dus au pinceau du Frère Picard. et le
souvenir de sa belle intelligence, firent regretter longtemps la
perte prématurée, durant ses études à
Rome, de ce jeune religieux artiste, l'un des plus brillants sujets
qui aient passé à Saint-Clément.»
Voici dailleurs, paru dans le même numéro, lun
des tableaux peint par le frère : il représente :
Ste Cécile jouant de la Harpe.
Ste
Cécile, Patronne des musiciens
L'entrée en jouissance de l'étage où nous allions
habiter (1), fut marquée d'un deuil: au cours de l'emménagement
de la mi-décembre 1899, le frère Raphaël Picard,
jeune philosophe aussi distingué par son esprit religieux
et par sa piété que par son talent, y rendit son âme
à Dieu. Avant sa venue à Rome, le frère Raphael
avait achevé, pour la modeste salle de spectacles de Saint-Clément,
un rideau de scène aux proportions respectables; le regard
s'y reposait, avec une profonde impression de paix, sur un paysage
où tout était enchantement. Etait-ce une échappée
sur le mystérieux Eden des poètes, que cette perspective
harmonieuse et variée, aux reliefs puissants, aux coloris
à Ia Puvis-de-Chavannes, aux lointains diaphanes et flous
comme ceux qui servent de théatre à nos rêves
?. . ou plutôt ne faut-il pas y voir l'essai bien senti d'une
âme idéaliste, imaginant sur la toile avec des couleurs
de la terre.., un coin de ce paradis que l'il humain n'a pas
exploré, dont elle avait pourtant la nostalgie et où,
si tôt, elle allait émigrer ?. . De part et d'autre
de la scène, le même artiste avait campé, grandeur
naturelle, un majestueux David pinçant le nébel et
une délicieuse sainte Cécile. (ci-dessus)
(1) Il sagit de la Maison de Rome, Piazza di Campitelli
C'était alors l'époque où une pléiade
de professeurs, dont on aura tout dit après avoir nommé
le Révérendissime Père Philippe, le regretté
Père Luc (Barth), le dévoué Père Rattaire,
élevaient à un niveau qui ne fut jamais dépassé,
l'âme et l'esprit des Petits Clercs de Saint-Clément.
Avec le Père Philippe, la grammaire grecque devenait presque
attrayante et cessait d'être énigmatique, tandis que
le traité « Du Sacerdoce » expliqué et
commenté comme il savait le faire, ouvrait sur l'idéal
des horizons, qui à trente-cinq ans de distance, nont
rien perdu de leur splendeur. Avec le Père Rattaire, c'était
le travail d'arrache-pied pour assimiler les littératures
classiques... et la grammaire latine. .. en latin, de Mario Laplana.
Avec le Père Luc (Barth), cet homme universel, éveilleur
d'idéal, également éminent en français,
en grec, en latin, en allemand, en technique musicale et instrumentale,
dont la mort prématurée au Congo laissa tant de regrets..,
avec le frère Raphaël enfin, les profanes devenaient
religieux, ou les béotiens, artistes...
A l'évocation de ces temps révolus, dont la grisaille
se dégrade, noyée dans le recul d'un quart de siècle
au moins... et qui, nimbés de l'auréole du passé
apparaissent si beaux, si câlins, si enchanteurs, les Anciens
de Saint-Clément aiment encore à se représenter,
comme à travers un nuage, dans une sorte de clair-obscur,
les essais du frère Raphaël.., David.., sainte Cécile..,
le rideau du théatre.., tout le cadre enfin d'un passé
plein de charme, tandis que, sur le mode héroïque, se
répercutent dans leur mémoire, les derniers échos
mourants de l'hymne scripturaire harmonisé par le Père
Luc: « Percussit Philistaeum. . . et abstulit opprobrium ex
Israël. . . » Et la résurrection de ce passé
inoubliable s'achève dans les suaves modulations, qui se
déroulaient, à l'époque des neiges d'antan..,
sous la baguette magistrale du Père Luc ou du Père
G. Brovillé...
Le couronnement le plus envié de leurs efforts, à
la suite des humanités, n'était autre pour quelques-uns
des meilleurs élèves de Saint-Clément et des
autres écoles, que l'annonce de leur départ pour les
universités de Rome; ils étaient sûrs d'y trouver,
joint aux avantages que l'on sait, celui de faire enfin plus ample
et intime connaissance avec le « Très Bon Père.
»
«LE PERE DEHON ET SON OEUVRE»
pages 400/401
AVANT-PROPOS,
EXERGUE - CAUSES
INTRODUITES
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